Le yose reste de loin la phase du jeu la moins couverte par la littérature. Pourquoi ? Parce que l’approche calculatoire par défaut ne suffit pas, et parce que l’enseignement des « coups gagnants » ou des règles absolues de priorité ne feraient que survoler le sujet. Le yose requiert à la fois des méthodes (évaluation, calcul, priorités), de l’entraînement (tesuji,  de gros yose, petit yose), mais aussi une lecture et une vision globale sur le goban.

La combativité hors pair de Dai Junfu et l’enseignement de Motoki Noguchi sont enfin réunis pour bâtir cette œuvre magistrale, quatrième opus de la collection Praxeo sur le jeu de go.

La lettre de l'éditeur

Comment enseigner le go ?

Une question complexe pour un sujet complexe, que tant de gens se sont posée depuis quatre décennies en France : Maître Lim, Hervé Dicky, Pierre Aroutcheff, Fan Hui, Pierre Audouard, Albert Fenech, la FFG et tant d’autres. Et autant de réponses ont été fournies. En conséquence, le niveau croissant du go en France ne cesse de monter, en particulier depuis dix ans ; les livres et les auteurs y contribuent. Dix ans, c’est aussi l’âge de la collection Praxeo, et Yose marque notre quatrième opus sur le jeu de go.

Alors, comment enseigner le go ?

« Écoute, fais ce que je te dis, un jour peut-être, tu comprendras » (Confucius). C’est la première approche, le niveau shu (« obéis ») du Shu Ha Ri 守破離. C’est l’approche que nous avions retenue pour l’initiation, avec Le langage des pierres (Motoki Noguchi, 2005), où « le maître » (sensei) guide pas à pas « l’élève ». Quatre éditions et neuf années de publication plus tard, Le langage des pierressemble toujours garder une place au premier plan auprès des débutants, des clubs et des enseignants.

Dans la foulée, l’entraînement, la répétition, le travail, et quelques recettes (tesuji), mêlés d’une juste dose de théorie : une deuxième réponse qui nous a semblé adaptée pour le perfectionnement, dans Tsumego (Motoki Noguchi, 2008). La dialectique de Sensei et de l’élève est toujours présente. Un ouvrage ambitieux où, cette fois-ci, le lecteur est le véritable héros, dont les éditions successives semblent prouver l’efficacité.

Pour emmener le joueur et le lecteur encore plus loin, nous avons pris plus de risques avec Chûban(Dai Junfu, 2010), et mis en place un enseignement résolument orienté ha  (« réfléchis », « digresse », « décide ») où l’auteur ne livre plus de « recettes » ; il laisse au contraire une grande liberté au lecteur, ce qui a permis de délivrer un message « à tiroirs » qui s’adresse aussi bien à des joueurs 8 kyu, 2-dan ou même 5-dan. Un pari risqué mais délibéré, et nous sommes fiers du résultat.

Alors, comment enseigner le go, et en particulier le yose ?

Peut-être la réponse est-elle beaucoup plus complexe pour ce segment du jeu, comme en témoigne le désert littéraire sur ce sujet, comparé aux myriades de livres de « recettes » traitant de jôseki et fuseki. Pour tenter d’y répondre, Praxeo, ses auteurs et un comité de relecture y ont consacré pas moins de quatre années.

Un premier manuscrit a été fourni en 2009. Le résultat semblait éblouissant de prime abord, mais trop risqué : il ne nous plaisait pas. Malgré ses qualités, il était trop ha, manquant d’enseignement « par répétition ». Un axiome s’est imposé : le Yose nécessite plusieurs niveaux de lecture, et donc plusieurs méthodes d’ensei­gnement. Parties réelles, parties de pros, lecture globale du goban, mais aussi tactiques de yose, tesuji locaux, théorie, calculs, évaluation et valeurs des coups, sente & priorité, sans oublier la lecture et le yose central dans le moyô ; tant de sujets qui, pris individuellement, ne s’enseignent pas de la même façon. 

 Dai Junfu et moi-même avons demandé à Motoki Noguchi de nous rejoindre pour participer à la refonte de la structure, du contenu, et du message en général. Et cette fois-ci, le résultat nous plaît : vous aimerez j’espère l’enseigne­ment des tesuji de Yose par Motoki (section IV), et prendrez rapidement les bonnes décisions stratégiques avec le Yose global de Dai Junfu (section V). Parallèlement, la théorie conjointe de la valeur des coups et des priorités, les méthodes d’évaluation et l’analyse quantitative (sections I à III) me semble avoir atteint un niveau de maturité très appréciable : synthétique, clair, efficace, complexe et riche mais rendue très abordable pour les joueurs de tous niveaux. La collaboration entre le champion chinois et le champion japonais, si différents et si complémentaires, fonctionne à merveille.

La table des matières

I – L’importance du yose (introduction)

Pourquoi un livre sur le yose ? Qu’est-ce que le yose ? Quelle importance a-t-il
dans une partie ? Quand commence-t-il ? Nous répondons ici à ces questions
fondamentales.

II – La valeur d’un coup et la priorité dans le yose

Pour appréhender le yose, nous avons besoin de quelques outils de base : la
classification des yose selon l’initiative, la façon d’évaluer la valeur d’un coup.
Cela vous permettra de repérer des coups prioritaires.

III – La valeur des coups classiques au yose

Il s’agit de la mise en pratique des outils que vous aurez acquis dans la section
précédente. Nous étudierons ici la valeur des coups de yose que vous rencontrerez
fréquemment dans vos parties.

IV – Les tactiques au yose : tesuji

Nous aborderons divers aspects tactiques du yose. Nous étudierons des tesuji,
aussi riches que ceux du tsumego. C’est aussi l’occasion d’approfondir vos
connaissances sur les types de situations fréquentes qui posent souvent problèmes
aux joueurs en kyu. Hormis les tesuji de haut niveau, vous apprendrez à bien
observer la position pour ne pas rater des coups simples, afin d’améliorer votre
performance au yose.

V – Le yose « global »

Dans cette section finale avec des exercices « globaux », vous réviserez d’abord
les techniques acquises. Une partie de haut niveau sur 19x19 clôt l’ouvrage pour
vous familiariser avec la stratégie au yose.